Faut-il impérativement faire subir de nouvelles fermentations en bouteille ou en fûts à toute une série de Belgian Pale Ale ? La question était posée dans le précédent article.

La refermentation, la panacée ?
Si vous avez suivi de manière attentive les derniers articles du blog, vous savez que la réponse est bien évidemment non. Il existe toute une série de bières de style Pale Ale belge qui n’ont pas besoin de subir de nouvelles formes de fermentation pour se hisser vers les premières marches de l’excellence. L’image annexée ci-dessus de quelques produits de la brasserie Rulles en est un parfait exemple. Il existe de très bonnes Belgian Pale Ale qui n’ont pas besoin de ce type de procédé pour être de qualité. Des bières brassées avec savoir et respect des composants. Rien de bien neuf finalement…

Ça marche à chaque fois ?
A contrario, il existe toute une série de brasseurs qui ont décidé de faire mûrir leur produit phare dans des fûts afin de lui faire subir une nouvelle fermentation dans l’espoir de proposer un nouveau produit, généralement de luxe ou haut de gamme. Ce résultat est alors proposé sous une appellation nouvelle tout en mettant l’accent (parfois fortement) sur la refermentation.
La brasserie Dubuisson a été une des premières de Belgique à employer cette technique avec ses standards forts. Et le moins qu’on puisse, c’est qu’à part l’exception notable de la Bush de Nuits (et, bien, après de la Bush de Charmes), le résultat était loin d’être franchement réussi. Avant-gardiste certes mais peut-être pas révolutionnaire… En fait, on avait l’impression de boire une version un peu plus corsée du produit de base. Et c’est bien ça le problème, c’est que cela n’apportait aucune plus value.
Actuellement, des brasseurs qui procèdent à l’instar de Dubuisson sont beaucoup plus nombreux que jadis. Et on assiste à un florilège de bières (soit-disant nouvelles) qui ne sont que des versions légèrement améliorées (mais pas toujours bonifiées) du produit de base. A part pour obtenir des bonnes notes sur Ratebeer (qui semble plus noter une bière à l’étiquette qu’au goût), cela ne présente aucun intérêt. Les dégustations à l’aveugle récentes de la gamme Goliath sur ce blog confirment bien la nature du problème.
La solution ?
Dire que la refermentation (en bouteille ou en fûts) est une solution pour améliorer une Belgian Pale Ale est une erreur. Le constat est simple depuis le début : il est possible de goûter une Belgian Pale Ale « classique » de très bonne qualité et une Belgian Pale Ale refermentée en fûts à peine buvable. En effet, si la refermentation peut être une technique pour proposer une Pale Ale de qualité, il faut (à mon estime) qu’elle respecte toutefois trois règles :
1) il faut que ce procédé amène une réelle plus value au produit. Ce n’est évidemment pas juste un vague goût tannique ultra discret (qui apparaît une bouteille sur dix) mais bien quelque chose de notable qui permet à la bière de ne pas être juste une version un peu retouchée du standard utilisé comme base.
2) mais il faut conserver tout de même le goût initial de ce dernier. On ne demande évidemment pas de faire une toute nouvelle bière totalement différente mais bien une autre version.
3) et il faut surtout que la bière garde sa drinkability. Et c’est à notre sens la difficulté majeure. Quand on parle de Belgian Pale Ale, les termes qui reviennent le plus souvent, outre la générosité, c’est cette faculté à être dégustée à n’importe quel moment de la journée, à n’importe quelle occasion. Et il faut garder cela à tout prix. Proposer du goût certes mais conserver cette facilité à être dégustée, ce qui implique un ABV léger et souvent inférieur à 7.
A mon humble avis, ce n’est que de cette manière que l’on peut proposer des Belgian Pale Ale refermentées qui présentent un intérêt pour le zythologue ou encore le simple épicurien. En bref, c’est en respectant les trois principes précités que l’on peut réellement proposer quelque chose de bon.